L’hiver, les surintendants en mode maintenance et planification
21 mars 2024
Les golfeurs ont déserté les lieux. Les toiles recouvrent bien les verts. Les fongicides et engrais ont été épandus. Tel un ours essoufflé, le terrain de golf se met en mode hibernation. Du côté du surintendant, toutefois, c’est le mode planification et maintenance qui s’enclenche.
Planification et maintenance, deux mots qui reviennent souvent lorsqu’on demande à des surintendants de terrain de golf de qualifier le travail à faire lorsque l’hiver s’abat sur le Québec.
«Quand les toiles sont bien installées, on respire mieux», commente Éric Coallier de Golf Tremblant.
«Oui, on respire mieux, renchérit Dany Jean du Royal Québec, sauf que l’an passé, en 2023, j’avais des golfeurs sur le terrain le dimanche 29 octobre et le lendemain, il tombait 5 cm de neige! Décidemment, 2023 n’aura pas été facile!»
«Je vous dirais que dans mon cas, précise pour sa part Julien Lambert du Elm Ridge, on est en mode plus relax une fois que les employés saisonniers sont partis. À ce moment-là, le plus gros du travail est fait, on en profite pour recharger les batteries.»
Réparer, aiguiser, entretenir…
Si, pendant l’été, lorsque surgit un problème, il est davantage question de «mettre des plasteurs», comme l’illustre Éric Coallier, puisqu’il l’achalandage sur le terrain demeure primordial, pendant l’hiver on prend le temps de bien faire les choses, de réparer, d’aiguiser et d’entretenir avec soin la machinerie.
«Juste du côté des véhicules utilitaires, donne en exemple Luc Ladouceur de Laval-sur-le-Lac, j’ai 32 appareils. Il faut faire les changements d’huile de tous ces véhicules. Pour la coupe, j’ai 45 unités. Encore là, il faut bien aiguiser les lames sans oublier l’entretien des pièces comme les roulements à bille. Nous gardons d’ailleurs deux mécaniciens à temps plein pendant l’hiver.»
«On a de l’équipement muni de boyaux hydrauliques, rappelle Dany Jean. Leur entretien est primordial. On n’a pas envie qu’ils se brisent en été et laissent des traces d’huile sur les verts. Ce serait désastreux!»
«Il est important, rappelle Julien Lambert, de faire un entretien complet de la machinerie pendant l’hiver. On ne souhaite pas débuter la saison suivante avec des appareils qui tomberaient en panne pendant l’été alors que les golfeurs sont au rendez-vous. On n’est jamais à l’abri d’un bris mécanique alors il faut réduire au minimum les risques.»
La planification
Donc la maintenance demeure un point fort dans les tâches hivernales des surintendants mais, comme précisé plus haut, la planification de la prochaine saison de golf prend beaucoup de place dans l’agenda. Et cela commence très tôt, ça coïncide avec les premiers jours de froid pour certains surintendants.
«Ici à Elm Ridge, explique Julien Lambert, on passe nos commandes d’engrais et autres produits d’entretien du terrain, dès octobre. Nous faisons ainsi des économies car quelques fournisseurs gèlent les prix à ce moment de la saison.»
«Dès la fermeture du terrain, ajoute Dany Jean du Royal Québec, je prépare mon programme de fertilisation pour la saison suivante.»
Les premiers jours de froidure sont souvent l’occasion de faire d’abord un inventaire des stocks, que ce soit les produits de terrain ou les pièces du système d’irrigation ou encore celles de la machinerie, puis on passe les commandes.
«Je peux parfois m’y prendre deux ans à l’avance, mentionne Luc Ladouceur, selon nos besoins. L’automne dernier, j’ai passé des commandes d’équipement pour la saison 2025. C’était entre autres pour de nouveaux rouleaux électriques pour les verts. À cause de la covid-19, il y a eu partout dans le monde un ralentissement dans la production d’équipements. De plus, toujours en raison de la covid-19, les clubs de golf ont maintenant plus d’argent. Ils en profitent pour faire des dépenses qu’ils ne pouvaient se permettre auparavant. Alors les stocks sont rares et il faut planifier bien des mois à l’avance si l’on veut obtenir les appareils et produits souhaités.»
L’ennemie jurée
Au-delà de la maintenance et de la planification, le travail d’hiver du surintendant en est aussi un de prévoyance. Car d’un hiver à l’autre, on ne sait jamais à quoi s’attendre côté météo au Québec.
«Le plus gros du stress, précise Dany Jean, je le ressens en décembre. Si jamais il pleut sur un sol pas encore gelé et qu’ensuite un froid solide s’installe…»
Tous le savent, l’ennemie jurée des surintendants, c’est la glace. Une glace qui s’invite alors qu’il n’y a toujours pas de neige au sol. Et justement, cela survient bien souvent avant les fêtes de fin d’année.
Quand la neige recouvre le terrain, lui offre un bon manteau de protection, là, tout le monde respire mieux. Est-ce donc le temps de s’offrir de belles vacances dans un tout-inclus dans les Caraïbes? Fuir l’hiver quelques jours sans craindre que, pendant notre absence, la météo ne devienne capricieuse et risque alors de causer des dégâts nécessitant une rapide intervention?
«Nous sommes pas mal mieux équipés que par le passé, affirme Luc Ladouceur de Laval-sur-le-Lac, pour faire face aux risques hivernaux. L’équipement s’est grandement amélioré, faisant en sorte que notre terrain sera bien protégé même si de mauvaises conditions météo se pointent pendant notre absence.»
«Quand les conditions d’automne, continue de son côté Éric Coallier, nous ont permis de bien faire notre travail de fermeture du terrain, on se trouve alors pas mal à l’abri. Ici à Tremblant, nous avons la chance de procéder aux fermetures à des dates bien fixes en raison des opérations pour la saison de ski qui suit. Alors nous ne sommes pas bousculés par les golfeurs voulant étirer leur saison ou, encore, par un hiver qui arrive trop tôt.»
«Je vous dirais qu’une fois le travail de fermeture bien fait et terminé, mentionne Dany Jean, il n’y a guère d’autres mesures à prendre. Et si un épisode de mauvaise météo survient, que l’on soit dans les Caraïbes ou chez nous au Québec, il n’y a pas grand-chose à faire que de se croiser les doigts en espérant que les dommages ne seront pas majeurs.»
Selon la région, c’est habituellement quand se pointe le printemps que le gros du travail reprend.
«En général, soutient Éric Coallier, à la fin de février et au début de mars, on commence à souffler la neige pour voir comment se sont comportés les verts. Là, je ne vous le cache pas, on connaît toujours un petit stress à ce moment-là. On ne veut pas de mauvaises surprises. Mais quelque part, quand on a bien fait le travail, l’automne d’avant, on reste confiant.»
Auteur : Martial Lapointe, journaliste